Bienvenue au cœur de l’histoire, je suis Virginie Giraud. Aujourd’hui, je vous raconte le destin hors du commun d’Émile Zola, le père du roman naturaliste et l’auteur de la saga littéraire des “Rougons-Macquarts”. Si le titre de ces livres comme “Germinal” ou “Au bonheur des dames” nous rappellent nos souvenirs de lycée, l’homme derrière la plume est passionnant. Zola est un humaniste qui n’a pas hésité à s’engager dans l’affaire Dreyfus. Mais l’écrivain à succès est souvent gauche avec ses proches qu’il blesse malgré lui, ce qui lui vaudra bien des tourmentes. C’est son histoire passionnante et pleine de rebondissements que j’ai envie de vous faire découvrir aujourd’hui dans un récit en deux parties. Émile Zola, la vérité sous la plume, épisode 1, naissance d’un naturaliste.
Nous sommes le soir du 29 septembre 1902, aux 21 bis, rue de Bruxelles à Paris. Émile Zola est rentré de sa maison de Médan avec sa femme Alexandrine. Des braises rouges voient dans la cheminée pour mieux supporter les premiers frimas. Le couple se met au lit. Après un sommeil agité, Alexandrine se réveille. Elle a la nausée et veut appeler un domestique. Émile l’en dissuade, pas question de déranger le valet au milieu de la nuit. Lui aussi il se sent mal mais il jure à sa femme qu’ils iront mieux demain. Un peu plus tard, le couple se réveille à nouveau, pris de violents mots de tête. Émile se lève pour aller ouvrir la fenêtre. Soudain, Alexandrine entend un lourd bruit de chute. Le lendemain matin, les domestiques inquiets frappent à la porte de la chambre du couple Zola. Il est 9h30, leurs maîtres ne sont toujours pas levés, ce n’est pas normal. Comme la chambre est fermée de l’intérieur, ils finissent par appeler la police. La marée-chaussée décide d’enfoncer la porte, la police entre dans la chambre des Zola, ce qu’ils découvrent alors les sidères.
Le père du naturalisme aurait dû avoir une enfance heureuse. Il naît à Paris le 2 avril 1840. Son père, François Zola, est un ingénieur d’origine italienne proche de l’historien et homme politique Adolfo Thier. Sa mère, Émilie, est une toute jeune femme de 21 ans prête à se dédier à sa famille. Alors qu’Émilie a 3 ans, la famille s’installe à Aix-en-Provence où François travaille au développement des réseaux hydrauliques provençaux. Émilie est un enfant calme avec un air un peu triste. François Zola meurt d’une pneumonie en 1847, quelques jours seulement avant les 7 ans de son fils Émilie. Sans son chef, la famille sombre dans la pauvreté. Émilie est aux abois. Elle tire continuellement le diable par la queue pour payer ses factures et nourrir son fils. Émilie tâche de faire bonne figure mais rien ne va. À l’école, il est plutôt timide et médiocre. Les élèves l’appellent le petit parisien pour se moquer de lui. Cependant, il s’entend bien avec un autre petit garçon au tempérament artistique. Paul Cézanne dessine tout le temps. Avec lui, Émilie apprend à observer le monde qui l’entoure. Quand Cézanne le croque sur ses cahiers, Zola le met en mot. Lui, il rêve d’être écrivain.
Alors qu’il a 18 ans, sa mère décide de l’envoyer étudier à Paris. C’est pour elle un lourd investissement mais elle veut le meilleur pour son fils. Après l’obtention d’une bourse, Émilie s’installe dans un appartement misérable du quartier latin. Au lycée Louis le Grand, le petit parisien d’Aix devient le garçon du sud à cause de son accent auquel, s’ajoute un léger zézaiement. Émile est marginalisé par les garçons snob des bonnes familles parisiennes. Pour couronner le tout, il attrape la fièvre typhoïde, probablement après avoir bu ou mangé de la nourriture contaminée. Il frôle la mort mais finit par se remettre après deux semaines de délire. Il est très affaibli au moment de passer le bac et le rate. Refusant d’attrister sa mère qui s’est saignée aux quatre veines pour lui, il demande à passer l’oral de rattrapage à Aix, là où il a grandi. Second échec. Émile se rend à l’évidence. Il n’a pas de talent pour les études. Ses rêves de Sorbonne s’évanouissent. Sa mère le rejoint à Paris. Il a honte de vivre à sa charge à presque 20 ans. Les années de Bohème commencent.